dimanche 25 juillet 2010

Les yeux jaunes des crocodiles

C’est de ma faute aussi. Je l’ai ennuyé avec mon amour. J’ai vidé mon cœur dans le sien. Jusqu’à la dernière goutte. Je l’ai rassasié. Il n’y a pas seulement l’amour, il y a la politique de l’amour, disait Barbey d’Aurevilly.


J’ai l’impression de, tout le temps, débuter mes billets livres par le même type d’accroche, alors je me suis dit que j’allais changer… C’est réussi, hein ? Bon, mais, maintenant qu’est-ce je dis… ?


Je crois que Katherine Pancol va être, pour moi, la Douglas Kennedy à la française. Un même souffle semble animer leur écriture.


De Katherine Pancol, j’ai commencé par Les yeux jaunes des crocodiles parce que je l’avais en magasin depuis un certain temps et que j’ai vu l’auteur, il y a peu, à la télévision dans Vivement dimanche prochain. Elle y parlait de son premier livre – Moi, d’abord – écrit il y a vingt ans qui a eu un grand succès ; de la question venue ensuite « comment faire pour en écrire un autre ? » ; de son départ pour les Etats-Unis pour apprendre à écrire. Cela m’a intriguée. Maintenant elle publie un livre par an et invente des personnages et des situations à y, presque, perdre le lecteur. Parce qu’il y en a du monde dans ses livres ! Et c’est tant mieux, sinon on s’ennuierait. Mais là, non, ce n’est pas possible !


Les yeux jaunes des crocodiles est une histoire d’amour, de famille, de sœurs, d’écriture, de chômage, d’argent, d’enfant et d’adolescent, d’adulte encore enfant et d’adolescent plus tout à fait enfant ; une histoire de caractère, celui des uns et des autres et le mélange qu’on en fait ; une histoire d’intolérance et d’apparence ; une histoire d’histoire qui aurait tout aussi bien pu se jouer au 12ème siècle.


Bon bah j’crois qu’il ne me reste plus qu’à acquérir La valse lente des tortues.


Et en attendant je vais me repaître de certains passages dédiés aux affres des écritures afin que ma réflexion se nourrisse elle aussi…


Depuis une heure et demie, Jo jouait avec son ordinateur, attendant l’inspiration. Rien. Pas le moindre frémissement narratif. (…) Inspiration, mot du XIIème siècle, issu du vocabulaire chrétien, qui charrie avec lui des notions aussi enivrantes que l’enthousiasme, la fureur, le transport, l’exaltation, l’élévation, le génie, le sublime. Elle venait de lire un texte magnifique d’un certain monsieur Maulpoix sur l’inspiration poétique et ne pouvait que constater qu’elle en était cruellement dépourvue. Clouée à terre, elle assistait, impuissante, à l’inertie de sa pensée. Elle avait beau l’apostropher, la supplier, lui ordonner de se mettre en branle, lancer un coup d’archet pour qu’elle s’ébroue, s’agit, s’échauffe, se délie, offre des images et des mots, des collisions avec d’autres images, d’autres mots, fasse surgir le Beau, le Bizarre, l’Intrépide, le belle se faisait prier et Joséphine, assise sur sa chaise de cuisine, labourait la table de ses doigts impatients. Pas la moindre envolée lyrique, pas le début d’une idée créatrice. Hier, elle avait cru en tenir une, mais ce matin, en se réveillant, l’idée s’était évanouie. Attendre, attendre. Se faire toute petite devant ce hasard foudroyant qui dépose à nos pieds ce qu’on a cherché en vain pendant des heures. Celui lui était déjà arrivé en rédigeant des morceaux de sa thèse, le choc de deux idées, de deux mots, comme deux silex qui s’allument. Il existait, ce glorieux éblouissement !


PANCOL, Katherine - Les yeux jaunes des crocodiles. Le livre de  poche, mai 2007

vendredi 16 juillet 2010

La reine des lectrices

En vue de découvrir ce qui fait aboyer ses "satanés chiens", la Reine d'Angleterre tombe sur le bibliobus de la ville de Westminster, garé au fond de la cour près de l'entrée des cuisines. De cela naît une nouvelle passion : la Reine lit, encore et encore, jusqu'à ne plus faire que ça.


Sous la plume drolatique d'Alan Bennett s'anime alors le pouvoir de la lecture. La lecture subversive. La lecture qui rend sensible aux autres.


"La littérature est une communauté, les lettres sont une République."


Mais lire n'est pas agir, constat qui nous mènera au dénouement... que je vous laisse le soin de découvrir.


"Ce qui m'a parfois donné le sentiment de tenir le même rôle qu'une bougie parfumée, destinée à chasser les relents de la politique - la monarchie n'étant plus de nos jours qu'un vague déodorant, au service du gouvernement."

mercredi 14 juillet 2010

Dis… à quoi tu penses ? #2

[Je poursuis tellement ça m'amuse. Le #1 est ]

- Où tu vas comme ça avec mon bassin ?

- Aïeeeeeeeee, ça fait mal, là quand même !

- T'as invité des potes  ou quoi ?

- Bonne nuit.

- Non, ceci est mon estomac. Pas un ballon de foot.

- Oh bah oui, non, c'est sûr, si ça te gène, tu n'as qu'à l'enlever de là. Ce n'est que mon foie...

- Ah tiens, il est 1h du matin. Et si j'allais aux toilettes ? (ça fonctionne aussi à 23h45, 00h22, 3h26, 4h46, 5h12 et plus si affinités).

- Bonne nuit, j'ai dit !

- Aaaaaaaaaaaaaaaahhhhhhhhhhhhhh.... (contentement ou douleur... ou les deux !)

- Il paraît que la progestérone est là notamment pour imbiber les os du bassin et atténuer ainisi la douleur quand le petit habitant sous le nombril agrandit son intérieur. Il est où le bouton pour en avoir une autre dose ?

- J'ai lu, je ne sais plus où, qu'au boulot, il était conseillé de ne pas jouer à la femme enceinte : 1) certes mais... plaît-il ? Quelqu'un pourrait-il m'expliquer ce que cela veut dire ? 2) Je fais quoi quand les gens ne me parle que de ça ? 3) Je crois qui : ceux qui me disent que j'en fais trop ou ceux qui crois que je n'en fais pas assez ? (La réponse ne serait-elle pas : tous ceux, et ils sont nombreux, qui ne laissent pas leur place aux femmes enceintes, personnes âgées et invalides dans le RER...).

- Non, allez, je déconne, j'avais bien compris que c'était à moi de m'adapter en silence (au sens imagé comme au sens physique du terme...).

- Je veux bien admettre que je suis un peu plus sensible. Un peu... Oh hé ça va, ne me dites pas que vous n'avez pas pleuré quand le personnage de la pub Tic Tac se sépare de Georges le yéti !

- Pourquoi tout tombe toujours invariablement par terre...

- Oooooooooh la vache ! ......... ah non c'est moi !

- Bonne n... ah bah, non, c'est l'heure d'aller bosser, en fait. Bon, bah, je dormirais ce soir.

mardi 13 juillet 2010

Blonde létale

Non, ce n'est pas ma nouvelle couleur de cheveu, ni même mon nouveau but dans la vie, mais bien le dernier livre que je viens tout juste d'achever.


Facile à lire et distrayant, Blonde létale  de Kate White est un petit polar sans prétention mais bien écrit. De l'action et des rebondissements et une chouette intrigue menée tambour battant sur fond de showbizzzz et d'amourettes.


Et pour donner un petit côté historique à ce billet fondamental, sachez que ce livre est paru dans la collection Girls in the city de Marabout,  collection où vous pourrez également et notamment trouvé Cinq filles, trois cadavres mais plus de volant ou Le prince charmant met de l'autobronzant.


Tout un programme que je m'apprête à adopter vu ma capacité de concentration actuelle !

jeudi 8 juillet 2010

Dis… à quoi tu penses ?

Serais-je toujours moi après ou mon moi-maman sera autre ? Différent ? A côté ?

Tu dors ?

C’est ton pied ou une de mes côtes ?

Va-t-on de A à Z juste pour s’occuper ? Remplir nos vies ?

La postérité nécessite t’elle une quelconque couverture médiatique ?

Quand est-ce qu’on dort ?

Est-ce toi ma postérité, petit bout d’éternité ?

A qui sont ces pieds dans mes chaussures ?

Oublierais-je, à ton arrivée, ma mortalité ?

C’est quoi cette nouvelle culpabilité ?

Te reconnaitrais-je, toi  que je porte en moi, lorsque tu seras sorti ?

M’aimeras-tu, toi, que j’aime déjà ?

Regardez une femme enceinte : vous croyez qu'elle traverse la rue ou qu'elle travaille ou même qu'elle vous parle. C'est faux. Elle pense à son bébé. (Anna Gavalda – Je voudrais que quelqu’un m’attende quelque part).

La disparition de Paris et sa renaissance en Afrique

Derrière ce titre engageant se cache le dernier roman de... Martin Page ! :)


A nouveau une lecture au bonheur des mots au sein de laquelle Martin Page nous démontre qu' "il faut que quelque chose se brise, un coeur, un mur, un crâne, pour qu'une histoire commence". Et quelle histoire !


A nouveau cette manie adorable de décortiquer le quotidien pour le décrire tout simplement et le rendre beau.


"je pense à ce mot "spécialités" qui rappelle les spécialités culinaires ; c'est ainsi, les médecins nous cuisinent, nous découpent, nous assaisonnent d'épices"


A nouveau un beau conte somme toute bien ancré dans le réel et dans un "quotidien sans éclat".


"Je me découvre un jour dans un monde où les choses font mal ; un monde où l'on me réclame de me battre ; un monde où il est toujours question d'anéantissement ou de victoire."(*)


(*) Frantz Fanon


PAGE Martin. - La disparition de Paris et sa renaissance en Afrique. Editions de l'Olivier, janvier 2010.

dimanche 4 juillet 2010

Quitter le monde

Quitter le monde tient les promesses d’un bon Kennedy. Drame, émotions et philosophie de vie. Tout y est. Bon, il ne détrône cependant pas A la poursuite du bonheur. Faut pas déconner quand même ! :)


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Un thème s'inscrit en filigrane de toute l’histoire du livre. Celui de l’incertitude. L'incertitude selon  Werner Heisenberg ou l’indétermination de tout fragment de vie dont on ne peut connaître dans le même temps la position et la vitesse.


« Cette idée que le destin n’est rien de plus qu’un déplacement arbitraire de particules qui nous entraînent vers des destinations que nous n’aurions jamais imaginées (…). » Cette « incertitude [qui] gouverne chaque moment de l’existence humaine ».


Ou l'incertitude selon Einstein, impossible puisque chaque particule en mouvement a une destination logique et dévastatrice, linéaire, dans un « enchaînement qui se veut logique ».


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On y trouve aussi de belles images canadiennes. De la musique classique fort bien contée. De la littérature décrite de telle façon qu’elle donne envie de reprendre des études. Tout un monde bien ficelé.


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Et une structure se fait jour. Une structure de construction de ses livres, car Kennedy construit ses livres quasiment tous de la même façon. A l’image de la vie, chaotique, qui monte et qui descend et essore méthodiquement l’être humain, comme une immense machine à laver.


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Un tout dont on s’extrait avec mal tant on finit par s’y sentir en famille.

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Mais le plus renversant, sans nul doute, survient une fois que vous avez été libérée du bébé et le bébé de vous, lorsque l’on vous tend la minuscule créature ratatinée et que vous la prenez dans vos bras pour la première fois. Cette vague d’amour incroyable qui vous emporte, et ce moment d’angoisse indescriptible. L’amour est immense, certes, parce que c’est votre enfant, tout simplement, mais la peur ne l’est pas moins. Peur de ne pas être à la hauteur. Peur de ne pas être capable de donner assez de bonheur à cet être à peine né. Peur de décevoir. Peur de se tromper.


Et puis votre fille se met à pleurer, et vous la serrez contre vous et à l’exaltation et à l’épuisement d’avoir accouché, d’entrer sur ce territoire inconnu et fascinant de la maternité, se mêle une nouvelle sensation qui s’installe fermement en vous, ce serment silencieux qu’une mère fait en baissant les yeux sur son bébé :


« J’essaierai de faire de mon mieux pour toi, toujours. »


KENNEDY Douglas. - Quitter le monde. Poche, 2010. 

Nocturnes

Une première lecture de cet auteur dont l'écriture et les idées ne laissent pas indifférent. Malheureusement rien d'impérissable. Je l'ai lu tout en ayant l'impression de manquer de quelque chose : une sensibilité particulière à la musique qui sous-tend chacune de ces nouvelles, une clef qui m'aurait permis de pénétrer le monde des personnages et de l'auteur, une page invisible au coeur de mes yeux. Ou que sais-je encore.

Je n'ai donc pas été transportée.

Dans la foulée, j'ai quand même voulu tenté l'expérience de Auprès de moi toujours dont on m'avait vanté les mérites. Sauf que j'ai abandonné au bout de quelques pages, pas du tout attirée par l'histoire, les personnages et leur vie telle qu'annoncée. Comme en marge à nouveau. Désagréable sensation que celle-ci : cette impression d'être au bord de la route et que l'histoire défile sans moi.

J'ai préféré le rendre à la bibliothécaire. Loin des yeux, loin du coeur de l'insatisfaction (je n'ai jamais aimé abandonner un livre même si je ne m'obstine plus et surtout quand on me l'a chaudement recommandé).

Bah, ce n'est pas grave, hein, j'me suis largement rattrapée ensuite comme vous allez pouvoir le constater tout de suite. :)

ISHIGURO Kazuo - Nocturnes. Cinq nouvelles de musique au crépuscule

Je suis un tremblement de terre

Une jolie fable à la Martin Page qui met en scène un jeune garçon atteint d'une "drôle" de maladie : il est un tremblement de terre.  Le diagnostic établi se pose alors la question : et s'il n'est pas possible d'en guérir, comment pourrais-je vivre avec cette différence ?


Aaaaaahhhhhh Martin (je peux vous appeler Martin ?), vous avez l'art et la manière de nous transporter avec ces petits contes. J'ai bien hâte de pouvoir initier mon oisillon au bonheur que constitue votre plume ! 


J'anticipe. Et alors ? :)


PAGE, Martin. Je suis un tremblement de terre. Neuf de l'école des loisirs.